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RENDEZ VOUS A
WATRINGHEM
QUELQUES EXTRAITS
SOLANGE
-
Je m'appelle Solange.
- Bonjour Solange, lui répondit l'assemblée.
- Solange, dit le présentateur, vous avez près
de 70 ans ! Expliquez-nous comment vous êtes arrivée ici. Je pense que votre
histoire mérite d'être racontée aux téléspectateurs de « C'est ma vie ».
- So-lange, So-lange, So-lange, scanda
l'assemblée.
Solange sentit fondre son
assurance devant cette ovation.
AURELIEN
Ce soir, j'ai posé un acte de rébellion dont j'ai cru jusqu'au bout que je ne serais pas
capable de l'accomplir. J'ai déserté le premier rang, j'ai gagné le fond de la salle et
de là, le coeur battant, je suis sorti de l'hôtel de ville. Je me suis enfoncé dans les
ruelles qui s'égaillent autour du majestueux édifice, j'ai marché au hasard, le regard
rivé sur les pavés inégaux de la chaussée. Ce soir, je n'assisterai pas à la
cérémonie de remise de médaille qui honore mon père, ce soir je me serai éclipsé. Je
reviendrai à l'heure du cocktail, je me glisserai dans la salle. Personne n'y verra rien.
Acte dérisoire et parfaitement inutile.
Sauf pour moi.
MELANIE ET JEROME
Et je ne sais quels mots avaient pu donner à cette fille inconnue, croisée aujourd'hui,
l'audace tranquille de ne pas être dans les normes et de l'assumer avec une sérénité
et un bonheur si évidents qu'ils m'atteignaient comme une gifle.
Une gifle salutaire, de celles qui remettent
les idées en place. Loin de se sous-estimer, cette fille était royale. Je fus soudain
frappée par l'évidence qu'en dépit de son physique atypique, elle aurait plu à
Jérôme. Parce qu'elle aurait respiré à sa hauteur ! Ce que je n'avais jamais su
faire.
PIERRE ET BARBARA
Je veux cesser
d'être le point de mire de tout un groupe et de quelques autres promeneurs, qui assistent
à la scène, curieux et compatissants.
Passer. Il faut passer. Je ne peux pas. Je ne
peux pas.
Ceux qui sont de l'autre côté sont d'un autre
monde.
Je les regarde avec envie et avec amertume.
Pourquoi n'ont-ils pas peur, eux?
ROBERT ET JULIETTE
Depuis des semaines, peut-être des mois, je passais mes dimanches en état d'errance.
J'arpentais les rues, sans but, sans rien regarder autour de moi. Puis, quand
j'avais déambulé depuis si longtemps que je ne sentais plus mes pieds, incapable de
rentrer chez moi où je savais ne retrouver que la solitude et l'ennui, j'entrais toujours
dans le même café.
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